NE PAS TRAVAILLER LE SOL
L’air dans le sol joue un rôle d’isolant et freine le réchauffement de celui-ci pendant la journée. Les sols meubles tendent à être plus froids en surface que les sols fermes parce que la conduction de la chaleur, y est plus faible. Un sol ferme emmagasinera plus facilement la chaleur qu’un sol travaillé et donc pourra la retransmettre durant la nuit ce qui permettra de gagner localement en température au niveau de la culture.
Un léger roulage pour raffermir le sol peut être utilisé si vous venez juste de travailler votre sol. Attention si le sol est trop humide il y a un risque de tassement et s’il est trop sec il n’y aura que peu d’effet du roulage.
MAINTENIR UNE LEGERE HUMIDITE DU SOL
Pour faciliter l’absorption de la chaleur, il est possible d’irriguer la culture pour rendre la captation de chaleur plus efficiente car l’eau est un très bon conducteur thermique. Attention, le but est de rendre le sol humide et non pas détrempé, cette intervention a pour but de passer d’un sol sec à humide. Irriguer sur un sol déjà humide peut avoir un effet inverse et diminuer la restitution de la chaleur pendant la nuit. Il ne faut pas non-plus irriguer s’il n’est pas prévu que le sol soit exposé au soleil d’ici l’aléa gel.
Pour permettre une meilleure absorption de la chaleur diurne par l’eau issue de l’irrigation, il est important d’appliquer l’arrosage un peu avant le zénith, de sorte que l’eau apportée ne soit pas plus froide que le sol, qu’elle soit présente dans les premiers centimètres au moment où le rayonnement est le plus important mais aussi pour que dans la mesure du possible, l’assombrissement du sol par l’eau rende le réchauffement plus efficient. Le gain de température fourni par le couple sol ferme et humide est évalué entre 0.6 et 1°C.
SUR LES RANGS ENHERBES, MAINTENIR UN COUVERT LE PLUS RAS POSSIBLE.
- Jusqu'à récemment, les recommandations concernant la gestion du milieu des rangs pour éviter les dommages causés par le gel étaient d'avoir un sol humide, ferme et nu au milieu des rangs. Ces recommandations étaient fondées sur le fait qu’elles favorisaient l'absorption du rayonnement solaire pendant la journée mais aussi la restitution au niveau de la culture, de la chaleur emmagasinée. Ces recommandations sont toujours valables et peuvent être suivies dans de nombreuses situations où l’enherbement n’est pas pratiqué.
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Lorsque l’enherbement est pratiqué, il y a plusieurs configurations possibles dont les
suivantes :
- Un couvert < 5cm contribuera à un gain d’environ 0.6°C ce qui équivaut presque au gain d’un sol ferme et humide.
- Un couvert > 5cm sera de 1 à 3°C inférieur à un sol nu. La situation a tendance à s’inverser dans une moindre mesure après quelques jours de rayonnement solaire faible et/ou de vents forts.
- Les couverts végétaux qui montent au-dessus des bourgeons peuvent dans certains cas faire office de protection mais des contre-exemples existent aussi. Cette technique n’est donc pas encore maitrisée d’autant plus que des couverts hauts, irréguliers et peu denses peuvent aggraver la situation en diminuant l’écoulement de l’air et en créant des poches d’air froid.
- Toutefois, les couverts hauts offrent une plus grande surface de gel sous les systèmes de protection par aspersion et par conséquent un supplément de chaleur dans la parcelle, mais leur hauteur ne doit pas dépasser 25 à 30 cm pendant la saison des gelées.
- Laisser un couvert mort dans l’inter-rang permet d’élever légèrement les températures minimales comparativement à des rangs où l’enherbement est fauché ou détruit.
CREER UN LÉGER VOILE DE FUMÉE AU LEVÉE DU SOLEIL.
Pour créer ce léger voile de fumée, un léger brulage de paille et/ou des ceps suffit. Ce type de protection n’est intéressant que pour limiter un réchauffement trop rapide du végétal au moment du lever du soleil et non pour élever la température significativement pendant l’épisode de gel. Ceci n'est pas une protection comparable à des bougies et n'est pas adapté pour être employé dans ce sens.
APRES UN EPISODE, QUE FAIRE DANS L’IMMEDIAT ?
Le plus urgent est de laisser à la vigne le temps de cicatriser et de réagir au choc subi, même sur plantier. Aucune intervention ne devrait être entreprise avant d’observer le redémarrage de la végétation, qui peut prendre 2 à 4 semaines en fonction de la température et de l’état hydrique du sol.
Durant ce laps de temps, il est impératif de ne pas enlever les rameaux gelés afin de préserver les bourgeons secondaires peut-être encore indemnes. Les pousses qui ont entièrement gelé tomberont d’elles-mêmes la plupart du temps. De même, il n’est pas nécessaire de retailler les bois juste après le gel dans la mesure où ceux-ci n’ont pas été endommagés.
QUE FAIRE QUAND LA VEGETATION REDEMARRE ?
ÉTAPE 1 : ESTIMER LE POTENTIEL DE PRODUCTION
Dans les jours qui suivent l’épisode de gel, les seuls dégâts visibles concernent les jeunes pousses issues des premiers bourgeons éclos. Pour estimer le regain de production probable, il faut attendre la reprise de végétation et observer quel type de bourgeon va se développer.
Pour une estimation précise, il faut déterminer par comptage la proportion de bourgeons primaires, secondaires, de la couronne ou du vieux bois impliqués dans la reprise végétative :
- S’ils n’ont pas gelé, les bourgeons primaires qui n’avaient pas débourré donneront le nombre de grappes habituel.
- Lorsque le bourgeon primaire est détruit, les bourgeons secondaires peuvent prendre le relais. Cependant :
- Ces bourgeons ont une fertilité en moyenne 10 fois inférieure à celle des bourgeons primaires (selon le cépage, la vigueur des sarments, les conditions de l’année précédente…).
- Lorsque l’ensemble du bourgeon latent est au stade pointe verte, les bourgeons secondaires gèlent à partir de -3 à - 4°C (il est donc fort probable qu’une partie d’entre eux ait été perdue).
- Les bourgeons de la couronne et/ou du vieux bois ont une fertilité quasi-nulle mais ils peuvent jouer un rôle crucial dans la production des futurs bois de taille.
ÉTAPE 2 : CHOISIR UNE STRATEGIE POUR CHAQUE PARCELLE
CAS DES PARCELLES EN PRODUCTION
Sur les parcelles gelées, l’itinéraire cultural doit être raisonné au cas par cas en fonction du potentiel de production estimé et des contraintes propres à chaque exploitation. Pour les vignes en production, le raisonnement peut être simplifié en distinguant deux stratégies possibles :
Stratégie 1 : parcelles pour lesquelles une récolte est possible cette année
Sans négliger la préparation des futurs bois de taille, la priorité sera de sécuriser et maximiser la récolte de l’année.
Stratégie 2 : parcelles pour lesquelles la récolte de cette année est compromise
Dans ce cas, la priorité sera de produire des bois de qualité du millésime suivant.
Plus les dégâts sont importants, plus la repousse risque d’être buissonnante avec de nombreux rameaux peu vigoureux et/ou mal positionnés. Un développement buissonnant augmente la sensibilité phytosanitaire et complique les travaux de taille, occasionnant un surcoût de main d’œuvre non négligeable.
A court-terme, il faut donc se préparer à un travail d’ébourgeonnage et d’épamprage plus important que d’habitude :
- Ce temps "perdu" sur la taille en vert est du temps gagné sur la taille hivernale, qui en l’absence d’ébourgeonnage nécessite 30 à 40 % de temps supplémentaire.
Sur les vignes non ébourgeonnées, la taille hivernale risque d’occasionner un plus grand nombre de plaies de taille qui nuiront à la pérennité de la souche.